Giacorode transforme le papier en vecteur d’émotions, donnant vie à ses œuvres par un métissage subtil de matières. Abandonnant la touche du pinceau, il crée des paysages abstraits en superposant papiers et pigments naturels, explorant la nature et l’espace avec une gestuelle inspirée et minutieuse.

Giacorode ne cherche pas l'originalité à tout prix, au contraire... Ses nombreux voyages et sa fréquentation assidue des musées lui fournissent sa matière première qu'il triture selon le principe essentiel à toute vie : le métissage.

« Je ne sais pas ce que je vais faire avant de l'avoir fait. »

Telle est la réponse de Giacorode si vous l'interrogez sur ses intentions, son inspiration.

Giacorode a remplacé la touche de pinceau (longtemps pratiquée) par le morceau de papier collé. Quelle différence ? Il reste peintre.

De ses premiers collages inspirés par les cubistes utilisant des papiers déjà imprimés, Giacorode est insensiblement passé à sa propre « fabrique » ou « cuisine » de papiers qu'il peint, triture, froisse, martyrise, huile, imprime pour qu'ils deviennent sa palette.

Le papier, vecteur d'émotions

De ses nombreux voyages, Giacorode a ramené matière à composer. Sa peinture est faite de morceaux de papiers à qui il a transmis la vie. Des fragments de papiers chargés d'émotions et de plaisirs qui s'entremêlent, se complètent et racontent une histoire différente à chacun d'entre nous.

Giacorode a délaissé le papier imprimé, de mauvaise qualité, et s'est lancé dans la fabrication de sa matière première à base de pigments naturels et de rouille.

Le peintre dépose d'un souffle créatif la vie sur des toiles vierges, joue avec la matière et les transparences pour suggérer, tisse patiemment ses paysages et les rattache d'un fil tenu au réel.

« Le collage n'a rien d'original », souligne-t-il, mais entre ses mains, il devient unique. On bascule du réel à l'abstrait par un jeu de construction subtil de couleurs, de formes et de lumières. Touche par touche, Giacorode puise en lui sa force créatrice, travaille ce qu'il voit à sa manière, profitant de la richesse de ce vecteur papier pour créer des effets de matières et de couleurs.

« Mon travail est toujours rattaché à la nature. Il n'y a rien à inventer, il n'y a qu'à regarder. » Regarder la peinture en abandonnant ce que l'on a acquis, ce que l'on a appris. « Le plaisir n'est pas dans le bla, bla, bla » insiste l'artiste.

Cosmogonie du paysage

Dans une technique qui renouvelle l’art du papier collé et l’abstraction sous toutes ses formes, Giacorode fait éclore la matière du magma dans des jeux de lumière comme en superposant des plaques photographiques sépia.

À la manière du pinceau, il explore l’espace avec le papier de soie froissé et des coupes de papiers imprimés dans un faisceau de strates minérales aux transparences laiteuses, tatouées, estampillées.

Il réinvente le paysage dans des ambiances stellaires fusionnelles, dont les pigmentations assourdies en créent l’éther.

Des paysages surgissent dans toute l’essence d’une calligraphie, comme une encre de Chine.

Il admet être fasciné par les forces de la nature, les geysers du parc de Yellowstone, les volcans d'Hawaï : « Je ne les décris pas, je les écris, allant au-delà de la simple apparence. »

Une spontanéité dans la perception et un équilibre dans l’espace passent par une gestuelle très sûre et inspirée.

C’est avec minutie qu'il va poser chaque morceau, cherchant parfois longuement sa place. Loin d'être figés, de ces collages jaillissent des lignes de force. L'aspect minéral semble s'animer, les surfaces éclatent, les rythmes naturels renaissent…