Anne peint comme on cultive un jardin, laissant la nature s'épanouir sur la toile. Chaque geste, chaque couleur reflète un équilibre entre vie quotidienne et création. Ses œuvres sont comme des pages d'un livre, où la peinture devient une mémoire vivante du cycle immuable de la vie.
Anne Moreau peint comme on cultive un jardin, avec la seule volonté d’amener doucement un morceau de nature, à l’accomplissement de lui-même.
Ce que la journée a semé en elle, elle le laisse devenir peinture simplement parce que c’est sa manière de récolter.
La peinture est à l’image de ce juste équilibre recherché et trouvé, de ce bonheur de peindre qui est un bonheur de vivre, de ce jardin que l’on cultive en sachant qu’il est souverain, mais que sans nous, il n’est que friche.
Sur la toile flottante comme l’eau peinte dans tous ses états,
Anne Moreau devient cartographe d’un domaine lacustre où tout semble conçu pour apprivoiser l’eau sans la contraindre ou la dénaturer.
Elle s’étend en ondulations hiéroglyphiques laissant, par transparence, apparaître l’ocre de la terre. Parfois enfermée momentanément dans un canal elle porte le bleu du ciel.
Tout vient d’elle et tout y retourne. L’homme s’installe à son bord, légèrement, comme un nomade. L’écluse, son bateau organisent l’espace par leur qualité d’instants qui passent au fil de l’eau.
Mémoire du vécu, chronique du quotidien, à la recherche d’un certain ordre du monde, qui cependant échappe à la narration.
Le propos n’est pas de raconter mais de transformer en signes ce qui bouge et change à l’intérieur de l’immuable cycle de la vie.
Anne Moreau a toujours utilisé l’écriture comme une sorte de mémorisation de faits objectifs, comme la garante d’une expérience attestée par d’autres.
Les choses sont ainsi.
L’aventure est de les communiquer en remontant aux sources de la communication entre les hommes : le symbole qui par l’image mêle l’idée et l’objet, la couleur qui vient en renforcer le sens.
Les toiles d’Anne Moreau pourraient être les pages détachées d’un livre,
un livre d’heures aux feuillets multiples,
chacun permettant une lecture autonome
et cependant subtilement reliés les uns aux autres
par le rythme d’une respiration commune.
La porte de l’atelier est le lieu de passage d’un état d’être à un autre état d’être,
vécu non comme une rupture
mais comme le prolongement de ce flux vital
parcourant le réseau des gestes quotidiens.
Celui de peindre répond à la même nécessité intérieure
que ceux qui accomplissent les travaux du jour.
Il vient à l’heure du retour vers soi.