Philippe Berthommier prend position face à l'art canonisé "contemporain" actuel. Il recherche l'essence de ce qui fait l'humain.
Assis à l’extrémité d’une longue table du hall aux allures d’atrium au cœur de l’atelier, Philippe, détendu, nous invite à observer l’art depuis son point de vue.
“Avec Marcel Duchamp, on introduit l’idée qu'est art, ce que je décide qui est de l’art”. Si une personne peut décider ce qui est de l’art, une personne peut aussi décider ce qui ne l’est pas. Ce positionnement est devenu l’art officiel. L’exposition et la notoriété sont indexées par rapport à l’influence que l’on attribue à l’artiste.
Professeur d’histoire de l’art, Philippe travaille la matière de la connaissance artistique autant qu’elle le travaille. Il s’est toujours éloigné des courants dominants. “Aujourd’hui tu fais un tas de sable, tu mets une ampoule, tu produis un texte et puis voilà !” Et l’art conceptuel ne lui suffit pas : “Je suis vivant, je suis fait de chair et d’os, j’ai faim, j’ai soif, je désire, je suis amoureux... Je ne vis pas qu’avec du concept. J’ai besoin de sensualité, de matière, d’accident, de biffures, de regrets… Comme la vie.”
L’art contemporain est “plastique”, superficiel, là où Philippe cherche dans les arts plastiques les traces du vivant. En 1989, l’exposition "Les magiciens de la terre” l’envoûte, apporte quelques pistes de réponses et produit un déclic en lui. Elle fertilise le terreau qu’il travaille.
“Jean-Hubert Martin invitait des artistes de tous les continents, déstabilisant un monde de l'art contemporain exclusivement limité aux frontières de l'Europe et de l'Amérique du Nord. Voyageant et se tournant vers des artistes enracinés dans des cultures ancestrales, résistantes au post colonialisme, en lutte contre le totalitarisme, et surtout curieux de l'ouverture planétaire émergente. Un double tabou était brisé ; celui selon lequel il n'existait d'art contemporain qu'en occident, et celui qui interdisait de montrer des œuvres de cultures différentes côte à côte.”